Le mouvement  » Steampunk  » fit sa première véritable apparition en France sous la direction de Daniel Riche, dans l’anthologie  » Futurs Antérieurs  » (chronique à venir). Après cela,  » L’équilibre des paradoxes fut le premier véritable roman steampunk écrit par un Français.
Il paraît donc essentiel de décrire le cadre du steampunk avant toute autre chose, ce genre demeurant limité à une poignée de romans (on doit ajouter  » Confessions d’un automate mangeur d’opium  » de Gaborit et Colin, et  » La cité entre les mondes  » de Francis Valery pour que la liste des parutions françaises soit complète). Le steampunk, en gros, c’est la science-fiction… Dans le passé. Ecrire du steampunk, c’est un peu tenter d’écrire de la science-fiction comme l’aurait fait un auteur du dix-neuvième siècle. Il est localisé de préférence au 19ème siècle, de préférence en Europe, en Angleterre serait le mieux. Il se diversifie parfois ( » Celui qui bave et qui glougloute « , de Roland C. Wagner dans  » Futurs Antérieurs « , se déroule chez les tuniques bleues et les indiens, aux Etats-Unis), mais a tendance à conserver un ton assez similaire.

Chez Pagel, on se retrouve en France, et on passera, au cours du roman, dans l’Algérie coloniale. Première bévue : le cadre spatio-temporel est à peine évoqué. Si ce n’est quelques références historiques (le steampunk tire souvent vers l’uchronie), son roman aurait pratiquement pu se passer dans un monde contemporain. A quoi ça sert alors ??? C’était juste pour caser une scène avec des pirates méditerranéens à deux balles ??? Il est question ici de voyages dans le temps et de paradoxes temporels. Des personnages issus d’époques et même de mondes différents se retrouvent réunis en un même endroit, et à partir de là s’engage une intrigue sans aucune originalité pour un roman de ce type. A vrai dire, il n’y a que le début du roman pour réellement sonner  » France du dix-neuvième « . Pour le reste, Pagel fait des efforts, mais l’écrivain de la fin du vingtième siècle, inexorablement, refait surface.
Les différents personnages (il y a autant de femmes que d’hommes) forment très vite différents couples. Bien sûr même ceux issus du dix-neuvième sont prêts à coucher dès les premiers soirs, et cela va de soit, fument de la ganja avec la fille trop overcool issue du milieu Hippie des années 70. Hey, Michel ! Tu te fous de nous ou quoi ? Depuis quelques temps, je me demande si les directeurs des collections du genre sf et fantastique n’obligeraient pas leurs auteurs à rajouter des scènes de fesses dans leurs romans, même si elles n’ont rien à y faire, histoire de mieux toucher ce public d’adolescent boutonneux qu’on prétend souvent être la principale audience du genre. Sûr qu’avec ce genre de manie, on n’est pas près de voir la sf considérée comme aussi littéraire que la prétendue  » littérature sérieuse « . Dans le cas présent, soit Pagel a voulu s’amuser à changer la vision d’un dix-neuvième puritain via l’intrusion de personnages plus  » modernes « , soit il n’a pas été capable de s’adapter au genre. Un peu dur à avaler quand on voit sa capacité à s’adapter aux genres littéraires !
Alors, pourquoi tout ce foin si le roman est décevant ? Parce qu’il est décevant, justement. Il aurait dû s’agir d’un excellent roman – il y en a quand même de nombreux éléments – et ce n’est, au final, qu’un semi-échec. Refiler le prix Julia Verlanger et le prix Rosny Aîné 2000 à ça, c’était peut-être un rien exagéré.

Note :
2/5